mercoledì 10 ottobre 2012

L'apparition de l'homme
selon Teilhard

par Henri Madelin sj
paru dans le journal La Croix, 8- 9 janvier 2011

Le Père Teilhard de Chardin est plus que jamais d'actualité en ces temps de crise et de morosité, lui qui fouillait les vestiges du passé de notre planète tout en tournant avec optimisme ses regards vers le futur de notre monde. Pour lui, l'humanité était en marche, non sans violence, vers une unité faite de différences et grâce à une montée convergente des consciences enveloppées dans la noosphère. L'hommage que la Mairie du XVI° arrondissement de Paris lui a rendu la dernière semaine d'octobre a pris place entre deux colloques, l'un à Assise sur les pas de Saint François, le plus « cosmique » des saints avec son Cantique des créatures, l'autre au Centre Sèvres pour se préparer à « construire la terre » dans l'optique de ce savant jésuite.
Teilhard est à lire ou relire en ce temps où la recherche scientifique scrute avec de plus en plus d'acuité la place de l'homme dans la biosphère et la mobilité des frontières qui le différencient durablement de l'animal, ce qui était déjà, à sa façon, une des préoccupations majeures du récit de la Genèse qui ouvre la Bible. Dans les temps qui sont les nôtres, la question du sens réapparait avec force, comme elle guidait la plume des rédacteurs du récit de nos origines. Signes des tourments d'une époque, beaucoup se demandent aujourd'hui avec anxiété quel est l'avenir de l'homme au sein d'une humanité emportée par un mouvement irrésistible de mondialisation. Sur ces grandes questions décisives qui mettent face à face les éternels sceptiques et les tenants d'une espérance renouvelée, le Père Teilhard avait une vision de grande ampleur au carrefour de la science, de la philosophie et de la spiritualité.
Au « sommet » du cosmos, il voyait l'homme. A plusieurs reprises, il s'est expliqué - et notamment dans Le phénomène humain - sur la façon discrète dont l'homme a fait son apparition dans la biosphère. Sa liturgie d'entrée est marquée par le silence : « L'homme est entré sans bruit ».  En fait, précise-t-il, « il a marché si doucement que, lorsque trahi par des instruments de pierre indélébiles qui multiplient sa présence, nous commençons à l'apercevoir – déjà du cap de Bonne Espérance à Pékin, il couvre l'ancien monde ». C'est une émergence qui se fait peu à peu. « En toute hypothèse, et si solitaire soit-il apparu, l'homme a émergé d'un tâtonnement général de la terre ». Il est né, précise-t-il encore, « en ligne directe, d'un effort total de la vie ».
Teilhard ne peur retenir un cri de jubilation devant un tel processus: « Suréminente dignité et valeur axiale de notre Espèce ». Avec l'homme, un nouvel axe se dessine. Avec lui, la biosphère atteint son point de culmination. Du coup, Teilhard dévoile ce mouvement. Il en fait son centre d'intérêt principal. Dans ses explorations de terrain et ses recherches en laboratoire, le chantre d'un Hymne à la matière tente de décrypter le sens de cette apparition du visage humain dans les profondeurs du cosmos. L'homme est perçu comme la « flèche de l'évolution » en marche vers un avenir aux horizons immenses. Il est l'unique possesseur sur la terre d'une conscience réfléchissante.
Les écrits et la correspondance personnelle montrent le savant et le croyant de plus en plus captivés par cet être fragile, venu au jour sans fracas. Sa course, rapide, rappelle celle de la flèche qui file à vive allure vers un avant encore inconnu. Ce nouveau venu est, parmi les vivants, le seul élément conscient de ce qui se passe. Car, en lui, « l'évolution est devenue consciente d'elle-même ». En d'autres passages, Teilhard parlera de ce « point critique traversé par la conscience qui, à force de se concentrer, finit par se réfléchir elle-même » (Tome V, p.91). Il y reviendra encore dans Le phénomène humain, son maître-livre qu'il a eu tant de mal à faire accepter par ses censeurs, en expliquant que, comme le mot l'indique, la réflexion est le pouvoir acquis par une conscience de se replier sur soi et de prendre possession d'elle-même comme d'un objet doué de sa consistance et de sa valeur particulière : « non plus seulement connaître, mais se connaître ; non plus seulement savoir, mais savoir que l'on sait ».
Dés lors, les questions jaillissent : « Pouvons nous sérieusement douter que « l'intelligence ne soit l'apanage évolutif de l'homme seul ? ». Et pouvons nous par suite « hésiter à reconnaître, par je ne sais quelle fausse modestie, que sa possession ne représente pour l'homme une avance radicale sur toute la Vie avant lui ? ». « L'animal sait, bien entendu, répond Teilhard, mais il ne sait pas qu'il sait : autrement il aurait depuis longtemps multiplié des inventions et développé un système de constructions internes qui ne sauraient échapper à notre observation…Un fossé, - ou un seuil – infranchissable pour lui nous sépare ». Nous ne sommes pas seulement différents, mais « autres ». Ce n'est pas seulement un changement de degré, conclut Teilhard, mais un « changement de nature résultant d'un changement d'état ».
Dès lors, le Christ, quand vint la plénitude des temps, peut se couler, lui aussi « sans bruit », dans cet univers en évolution. Teilhard en tire les conséquences dans La vie cosmique : « Depuis que Jésus est né, qu'il a fini de grandir, qu'il est mort, tout a continué de se mouvoir parce que le Christ n'a pas achevé de se former. Il n'a pas ramené à Lui les derniers plis de sa robe de chair et d'amour que lui forment ses fidèles. Le Christ mystique n'a pas atteint sa pleine croissance, ni donc le Christ cosmique. L'un et l'autre, tout à la fois, ils sont et ils deviennent ; et dans la prolongation de cet engendrement est placé le ressort ultime de toute activité créée. Le Christ est le Terme de l'Evolution, même naturelle, des êtres ; l'Evolution est sainte »
Père Henri Madelin
Service Jésuite Européen
Bruxelles et Strasbourg
Deux vidéos montrant qu'il a fallu 50 ans pour que Teilhard de C

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